coagulation du lait

La première étape de la fabrication du fromage est la coagulation du lait. Durant cette phase, le lait se transforme en un gel que l’on appelle le caillé.

La coagulation du lait peut se faire de deux façons :

– Par l’acidification du lait qui se fait naturellement dans le temps.  Le lactose est transformé progressivement en acide lactique par les ferment présents dans le lait. Cela donne un caillé lactique friable et perméable (ex: fromages blancs, yaourts, fromages frais…).

– Par l’action d’enzymes issues de la présure. Pour obtenir des fromages qui se tiennent et se gardent longtemps, le fromager est obligé de faire appel à cette technique de coagulation.

Cette semaine, je vous propose donc de mettre en vedette la présure : son histoire, sa place parmi les agents coagulants qui existent aujourd’hui, son action et bien sûr comment je l’utilise en pratique dans mon atelier.

Comment la présure a-t-elle été découverte ?

prehistoire et decouverte de la presure animale

Pour de nombreux historiens, l’action de la présure aurait été découverte à la Préhistoire, sans doute au hasard. En effet, à l’époque, les hommes utilisaient les estomacs des bêtes pour en faire des gourdes. Il semblerait qu’un jour ils se soient rendus compte que le lait stocké dans les estomacs de ruminants se solidifiait et pouvait se garder plus longtemps. C’est la naissance du fromage !

L’estomac des jeunes ruminants contient en effet un agent précieux qui permet d’accélérer le caillage du lait et donc de le transformer en fromage : la présure.

 

Qu’est-ce que la présure ?

En fromagerie traditionnelle, ce processus ancestral a été amélioré. Pour fabriquer la présure d’origine animale, on fait macérer des caillettes séchées de veau (4ème poche de l’estomac) dans une solution d’eau salée . Ce procédé d’auto-digestion va ainsi libérer des enzymes dans le milieu.

Ce milieu enzymatique est riche en chymosine, enzyme responsable du caillage du lait, et en pepsine, enzyme responsable de la dégradation des protéines. On y trouve également des minéraux et des facteurs de croissance. Ces enzymes, qui, à l’origine, permettent aux animaux de digérer le lait, accélèrent le caillage et la formation du fromage.

La première présure standardisée n’a été produite qu’en 1872 (extraction des enzymes) .Sa commercialisation industrielle date de 1874 offrant ainsi au fromager une alternative plus pratique que la macération des caillettes de veau séchées.

La présure animale peut se présenter sous forme liquide, en poudre ou peut-être faite maison à partir de caillette sèches.

 

Les autres agents coagulants du lait

chardon sauvage coagulant fromage

Aujourd’hui, de nombreux fromages à pâte pressée sont fabriqués à partir de présure animale et le cahier des charges de la plupart des fromages d’Appellation d’Origine Protégée impose l’utilisation de présure animale. Cependant, il existe d’autres types d’agents coagulants qui peuvent être utilisés pour faire cailler le lait :

  • Les coagulants microbiens (enzymes coagulantes issues de la culture de moisissures ou fabriquées à partir d’organismes génétiquement modifiés). Dans l’industrie, ce type de coagulant est de plus en plus utilisée du fait de son coût faible.
  • Les coagulants végétaux (enzymes coagulantes d’origine végétale). Ils sont plus rares. On peut par exemple faire référence à la fabrication du fromage AOP Azeitao au Portugal qui est coagulé à partir de la macération de Chardon sauvage. NB : Les plantes peuvent donner un goût amer aux fromages à base de lait de vache. Cette technique est plutôt utilisée pour les produits à base de lait de brebis ou de chèvre.

 

La présure faite maison

Pour faire directement votre présure, vous pouvez acheter des caillettes sèches. Plongez une part de celles-ci (environ 40 g pour 10 litres) dans du sérum à 45°C, placez en étuve jusqu’à disparition des morceaux de caillette. L’avantage c’est d’avoir une présure faite maison à moindre coût, riche en bactéries lactiques. L’inconvénient c’est que l’on ne connaît pas sa force et sa qualité.

 

La force et la qualité de la présure

La présure sert à cailler le lait, c’est à dire à faire passer le lait de l’état liquide à l’état solide. Ceci se fait grâce à la chymosine qui attaque une partie extérieure de la micelle de caséine qui va du coup changer de polarité et s’associer à du calcium pour former un réseau et emprisonner l’eau, des matières grasses, des bactéries et le lactose.

La force de la présure est la capacité à cailler une certaine quantité de lait à une température et en un temps donné.

La qualité de cette présure va influencer l’homogénéité de l’organisation du micelle dans le coagulum.

Grâce à la qualité de l’action de la présure, on obtient :

  • une augmentation de la fermeté et de la souplesse du caillé et donc une diminution des pertes durant le découpage,
  • une amélioration du développement des bactéries lactiques et d’affinage grâce à la présence de facteurs de croissance (acides aminés et peptides),
  • une amélioration de la texture de la pâte (caillé homogène et régulier)

On l’utilise à des doses de 10 à 35 ml pour 100 litres de lait. Attention toutefois à ne pas dépasser les doses conseillées car vous aurez un goût d’amertume.

AOP Bleu du Vercors Sassenage

 

En pratique :

  • J’utilise de la 300 (300 mg de chymosine). En industrie ils utilisent plutôt de la 520. Ma présure a l’avantage d’être moins forte et d’amener beaucoup plus d’enzymes différentes et de facteurs de croissance (augmentation de la typicité de mon fromage). De plus, comme j’ai des maturations chaudes et longues, j’ai un lait plus acide à l’emprésurage. Du coup, je mets moins de présure (moins de 30 ml pour 100 litres) pour des temps de coagulation de 30 mn pour la tommette à 35 mn pour le Rapille car l’acidité favorise l’action de la présure.
  • Je n’utilise pas de coagulants microbiens car ce sont des produits qui sont issus d’organismes génétiquement modifiés. De plus, ils ne produisent que de la chymosine et n’amènent rien d’autres qui pourraient typer nos fromages. Ce n’est pas dans la philosophie de la production fermière.
  • Je ne fais pas appel à des coagulants végétaux car ils sont actifs à une plus haute température et donnent de l’amertume aux fromages de vache.
  • La présure que j’achète est fabriquée à partir d’une macération longue de caillette et est fabriquée en France.

N’hésitez pas à partager vos expériences et vos questions dans les commentaires.

A bientôt sur Fabriquetonfromage.com !

Pour aller plus loin, vous pouvez lire :

La Revue des ENILS N°347 : les coagulants

Les pratiques du fromager n°8/52 : La présure en fabrication fermière
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14 réflexions au sujet de « Les pratiques du fromager n°8/52 : La présure en fabrication fermière »

  • Bonjour, combien de temps peut on conserver une présure faite maison? Comment la conserver? Merci pour votre partage de savoir, cest très interessant!!

    1. Bonsoir, Une présure se conserve au froid et à l’abri de la lumière.Sur celle que j’achète, les DLC sont longues + de 6 mois pour un produit qui est vivant.Donc celle que l’on fait peut se garder longtemps si les règles d’hygiène ont été respectés.Il faut faire confiance à son nez,si on a un doute sur l’odeur, autant en refaire.A bientôt. Philippe Moinier

  • Bonjour
    je m essaie a la fabrication de la tomme maison artisanales j’ai tout les ingrédients ( lait de montagne pasteurisé,Mais un léger soucis ..après avoir mis la présure du commerce ..mélangé.. j obtiens une caillettes trop molle ( donc je me suis dit je laisse encore une nuit Coagulé..) hé non je petits est bien remonté dans la casserole mais pas plus de caillette plutôt un lait onctueux style crème.. impossible a moulé en faisselle …donc je ne sais plus quoi faire… dois je refaire avec la préparation une montée en température…. remettre du ferment ? et recommencer le processus ?
    voila je vous remercie de vos informations 🙂
    Meilleures salutations
    claude
    74140 st cergues
    HHaute Savoie

  • Bonjour je viens d’acheter de la présure en poudre que je dois diluer dans de l’eau. La question est est-ce-que on peut conserver la présure diluer et si oui combien de temps. Merci beaucoup d’avance pour la réponse

  • Merci pour ces éclaircissements, mais peut-on fabriquer le fromage sans passer par l’action des enzymes issues de la presure , et donc par simple procedè naturel qui serait l’acidification du lait qui se fait naturellement dans le temps comme vous nous m’expliquez si bien . Si je vous le demande c’est Parcque je ne mange pas d’animal bovin , ou très rarement , et l’idée que le fromage soit mélangée avec de la matière de viande animale, j’y arrive pas. (Donc mes choix en fromages sont très limités ).
    Ainsi donc est ce que la simple acidification donnerait le même rendu que sous l’action de la presure ?
    Merci
    Daniel

    1. Bonsoir, les seules fromages que l’on peut fabriquer par simple acidification sont les fromages frais, faisselles, st marcellin.La presure permet des pâtes qui se tiennent et qui s’affinent longtemps.
      Bonne soirée.
      Philippe Moinier

  • Merci bien pour toutes ces informations j’aimerais bien réussir un camber que j’adore beaucoup si je trouve pas de presure en pharmacie pourrais je utiliser que fleurs de chardon ou de cardon?

    1. Bonjour, pour récupérer la caillette ,il faut effectivement tuer un veau. il n’est pas tuer que pour cela mais plutôt pour sa viande et il a plus de 6 mois.Maintenant vous pouvez utiliser soit des plantes ou de la présure d’origine bactérienne OGM, mais qui ne vous amènera pas toute la flore de la caillette animale.
      Cordialement,
      Philippe Moinier

  • Bonjour,

    Y a-t-il un animal a privilégier en fonction du lait/fromage?
    Je souhaite faire du roquefort, quelle présure animale utiliser?
    Caillette de veau / de chevrette / d’agneau?

    Merci.

      1. Merci!

        J’avais contacté Société qui m’a confirmé la même chose. C’est très appréciable de prendre ce temps.

        Je commence mon premier roquefort la semaine prochaine. J’espère avoir choisi les bons ferments.

        Bonne continuation !
        François

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